2020 Reform of old-age pension system bodes disaster for AHV, Petra Goessi
echo-Interview, juillet 2017

Avec la réforme Prévoyance vieillesse 2020, l’AVS court au désastre

ELIPSLIFE ECHO - DES ENTRETIENS AVEC DES PERSONNALITÉS DE L'INDUSTRIE

Avec la réforme Prévoyance vieillesse 2020, l’AVS court au désastre

echo interview avec Petra Gössi, conseillère nationale et présidente du PLR.Les Libéraux-Radicaux Suisse

Madame Gössi, vous nous accueillez en costume traditionnel pendant la session d’été qui se tient au Palais fédéral dans le cadre du débat sur la prévoyance. Faut-il voir un rapport entre votre costume et ce débat?

Non, absolument pas. L’explication est simple: il y a ici une fois par législature une journée du costume. C’est pourquoi je porte aujourd’hui un costume schwyzois pour les jours ouvrés.

Passons au sujet qui nous intéresse: à quel âge pourrez-vous prendre votre retraite lorsque ce sera votre tour de le faire?

Cet âge sera bien plus élevé qu’aujourd’hui. Il sera par ailleurs flexible, de sorte que les gens pourront décider eux-mêmes à quel âge ils voudront partir à la retraite. Il sera de surcroît sensiblement plus élevé si la réforme Prévoyance vieillesse 2020 est adoptée. L’extension de l’AVS augmente encore beaucoup le coût de la prochaine réforme.

Le PLR et de larges pans de l’économie rejettent la réforme Prévoyance vieillesse 2020 décidée par le Parlement. Le statu quo est-il donc préférable à la réforme?

Ce qu’il nous faut, ce n’est pas un semblant de réforme, mais une vraie réforme. La réforme Prévoyance vieillesse 2020 aurait dû garantir le financement de l’AVS, mais elle manque complètement sa cible. Au lieu d’assainir l’AVS, on a choisi de l’étendre, ce qui la met clairement en danger. L’augmentation de CHF 70 de la rente AVS est synonyme d’extension du 1er pilier. La réforme Prévoyance vieillesse 2020 fait du coup l’effet d’un accélérateur de feu pour l’AVS. À long terme, nous courons avec l’AVS au désastre. Nous devrons dès 2027 faire face à un nouveau déficit de 1 milliard de CHF, qui atteindra même 7 milliards de CHF à partir de 2035. Nous ne pourrons plus le financer. Ruiner au lieu d’assainir. La réforme Prévoyance vieillesse 2020 rate donc totalement son principal objectif.


 

echo-Interview, July 2017

La réforme Prévoyance vieillesse 2020 devait adapter le système, qui combine avec les trois piliers les prévoyances étatique et privée, au futur. Qu’est-ce qui, selon vous, s’est mal passé?

En premier lieu, on a mélangé les deux premiers piliers. La réforme Prévoyance vieillesse 2020 affaiblit le 2e pilier et étend le 1er sans financer cela de façon durable. On affaiblit ainsi l’ensemble de notre système de prévoyance vieillesse à trois piliers. Et on a perdu de vue l’objectif initial, qui était de sécuriser durablement le financement des deux premiers piliers. La réforme Prévoyance vieillesse 2020 ne fait que reporter le problème sur la nouvelle génération. Elle n’est donc qu’un semblant de réforme.

Le PDC a pris position, au cours de l’année électorale, aux côtés des syndicats et a adopté une version light de l’initiative AVSplus. La gauche a approuvé les requêtes de ce parti visant à augmenter les rentes des couples mariés. Il n’a plus été possible de faire machine arrière sur les cadeaux promis au cours de l’année électorale, même si on ne sait pas comment ils seront financés. Les deux partis se sont donc livrés à un marchandage sur le dos de l’AVS et ils n’ont pas pu revenir sur la ligne qu’ils s’étaient fixée sans perdre la face.

On entend aujourd’hui souvent que le contrat de génération ne fonctionne plus. Quelle forme doit-il revêtir pour que le PLR soutienne une réforme de la prévoyance vieillesse?

Nous devons rediscuter du contrat de génération, car celui-ci ne fonctionne effectivement plus. C’est ce que montre clairement la réforme Prévoyance vieillesse 2020. Elle est injuste rien que parce que les retraités actuels ne perçoivent pas les CHF 70. Certes, elle ne concerne pas la baisse du taux de conversion, mais ces personnes supportent l’augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée. Il est en outre injuste d’appâter les personnes âgées de 45 ans et plus qui n’ont pas encore atteint l’âge de la retraite avec des rentes augmentées de CHF 70 pour obtenir leur assentiment. Je ne comprends pas que l’équivalent d’une génération (20 ans) ne doit supporter aucune réduction du taux de conversion de la part obligatoire de la caisse de pension. Et la plus grande injustice: la jeune génération reçoit certes CHF 70 d’AVS supplémentaires, mais elle doit être prête à accepter des pertes de salaire, des hausses de la taxe sur la valeur ajoutée et un taux de conversion plus faible. Les jeunes supportent l’essentiel du fardeau. C’est avant tout inacceptable parce que ce seront de nouveau eux qui souffriront, dès 2027, lors du refinancement de l’AVS. Quand on parle contrat de génération, il faut en concevoir un qui soit juste et ne fasse pas peser l’essentiel du fardeau uniquement sur les jeunes.

Le PLR et les associations économiques sont sceptiques quant à l’augmentation de CHF 70 des rentes AVS, tandis que les jeunes socialistes émettent des réserves sur le recul de l’âge de la retraite à 65 ans pour les femmes. Risque-t-on de ne pas trouver de solution à cause d’idéologies trop fortes?

Non, je ne le pense pas. La majeure partie de la population est d’accord pour que les hommes et les femmes partent à la retraite au même âge. Par ailleurs, nous avons, il faut le souligner, émis diverses propositions de compromis. La droite a par exemple proposé de supprimer la déduction de coordination et d’améliorer ainsi les rentes des employés à temps partiel. M. Rechsteiner, responsable syndical, avait demandé au Conseil des États d’adopter cette mesure, et nous l’avions proposée comme compromis contre les CHF 70. La gauche a cependant été sourde à tout compromis et a fait passer en force ces CHF 70 préjudiciables et injustes. C’est encore un gros inconvénient de la réforme Prévoyance vieillesse 2020: les plus pauvres auront en fin de compte le moins d’argent en poche parce que les CHF 70 devraient tout simplement être déduits des prestations complémentaires. Il ne s’agit absolument pas d’un jeu à somme nulle, parce que les rentes AVS sont imposées, ce qui n’est pas le cas des prestations complémentaires. Et comme ce sont aussi ces personnes qui doivent s’acquitter de la taxe à la valeur ajoutée la plus importante, elles peuvent au final compter sur des sommes moindres. Il est absolument scandaleux de monter une réforme qui prend les plus jeunes et les plus pauvres pour les dindons de la farce. Et pourtant c’est la gauche, qui montre à l’envi à quel point elle est sociale, qui soutient cette réforme.

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Le PLR a-t-il un plan pour le cas où la réforme serait rejetée dans les urnes?

Nous voulons tout d’abord protéger l’AVS. Nous tiendrons à la retraite à 65 ans pour tous. Cela alimentera la caisse AVS à hauteur d’1,2 milliards de CHF par an environ. Le financement de ladite caisse sera assuré par l’augmentation concomitante de la taxe sur la valeur ajoutée. Il faut, dans un projet séparé, baisser le taux de conversion du 2e pilier. Nous prévoyons, à titre compensatoire, de baisser la déduction de coordination. Nous aidons ainsi les employés à temps partiel, et surtout les femmes, à augmenter leur épargne de 2e pilier. Le PLR ne se prononce pas contre une réforme de la prévoyance vieillesse, mais nous voulons une réforme qui en soit vraiment une.

En Suisse occidentale, beaucoup d’associations économiques soutiennent la réforme. Sommes-nous menacés par une nouvelle barrière de röstis?

Non, je ne le pense pas. Si les associations économiques de Suisse occidentale soutiennent la réforme Prévoyance vieillesse 2020, elles poursuivent des intérêts propres, conformes à leurs objets. Il est clair qu’elles n’ont pas pour objectif principal de soutenir des solutions globales bonnes pour la Suisse. Beaucoup d’entre elles veulent absolument baisser le taux de conversion, ce qui sera à coup sûr si la réforme Prévoyance vieillesse 2020 est adoptée. Je peux comprendre que cela ne les intéresse pas de résoudre les problèmes des prochaines années. Mais cela n’a rien à voir avec la barrière de röstis.

La politique de la Suisse est entre autres fondée sur le bon compromis suisse, auquel beaucoup se réfèrent. A-t-on aujourd’hui encore suffisamment confiance dans la politique pour assoir l’assainissement de la prévoyance vieillesse sur un fondement solide?

Bien sûr que les gens ont encore fondamentalement confiance. Chaque groupuscule isolé provoque beaucoup de choses à force d’en parler et d’écrire dessus. Politiquement, la difficulté se situe à un autre niveau: les projets sont aujourd’hui trop importants et trop complexes. Nous devons contrecarrer cela. Il n’est déjà pas facile de comprendre ne serait ce que les mécanismes de l’AVS. Dès lors que s’ajoutent à cela la complexité du 2e pilier et que le tout est suralimenté, beaucoup de citoyens se perdent dans les détails. Je comprends bien qu’on ait tendance à rejeter la nouveauté si on ne peut en évaluer les conséquences. Par ailleurs, à l’ère des médias sociaux, les politiques ont besoin d’être perçus clairement. C’est pourquoi ils mettent parfois au second plan le fait d’assumer ensemble un compromis. Cela n’a cependant rien à voir avec le thème de la prévoyance vieillesse. C’est vraiment plutôt une tendance générale en politique.

echo interview with Petra Gössi, National Councillor and President of Switzerland's Liberal Democratic Party (FDP)

Le 2e pilier sert aujourd’hui, essentiellement du fait d’un taux de conversion trop élevé, à faire financer les rentes des retraités par les actifs. La réforme Prévoyance vieillesse 2020 baissera ce taux à 6%. Ne rendons nous pas un mauvais service aux caisses de pension si nous rejetons la réforme dans les urnes?

Personne ne conteste la nécessité de baisser le taux de conversion. Cependant, si, à cause d’une réforme faite à la va-vite et sans réflexion aboutie, nous nous retrouvons dans quelques années dans une situation encore pire, alors nous préférons attendre encore quelques mois. Beaucoup disent oui à la réforme Prévoyance vieillesse 2020 parce qu’elle garantirait la baisse du taux de conversion. En politique, il ne faut cependant pas faire de prévisions à court terme. S’il y a quelque chose qu’il faut concevoir à long terme, c’est bien la prévoyance vieillesse. C’est par définition un projet générationnel.

Les pays étrangers envient à la Suisse son système à trois piliers, qui a fait ses preuves. Que faut-il pour que celui-ci puisse continuer à fonctionner à l’avenir?

Il faut une réforme qui ne commence pas par faire jouer les piliers les uns contre les autres. C’est ce qui motive principalement notre non à la réforme Prévoyance vieillesse 2020. Il nous faut renforcer clairement chacun des piliers et non pas nous diriger vers une rente unique ou nationale. C’est le chemin que veulent emprunter les syndicats. Pas nous. En effet, si, un jour, nous ne pouvons plus financer l’AVS, nous devrons prendre l’argent sur la part obligatoire des caisses de pension. Nous ne pourrons pas faire autrement. C’est pourquoi il est clair pour moi que la réforme Prévoyance vieillesse 2020 est le début de la fin du principe des trois piliers. Certains responsables syndicaux avouent même ouvertement que la réforme Prévoyance vieillesse 2020 constitue pour eux un précédent pour des réformes ultérieures, dans lesquelles le 2e pilier sera affaibli.

N’y a-t-il pas un danger que le volume de taux d’intérêt et la croissance démographique bouleversent essentiellement le 2e pilier et que nous soyons tous victimes de promesses de prestations impossibles à financer?

Les caisses de pension doivent étudier ce point. Mais les politiques aussi. À quoi sert exactement le 2e pilier? De quels fonds supplémentaires les caisses de pension ont-elles besoin pour pouvoir se protéger? Cela vaut le coup d’examiner ce sujet sur le plan politique. Nous ne pouvons pas cotiser à un système dont le maintien nécessite des fonds. Les gens aussi on droit à ce que l’argent qu’ils ont épargné leur revienne.

N’avez-vous pas le sentiment qu’il y a urgence pour les caisses de pension elles-mêmes?

Il faut contrôler les coûts liés au système. C’est là qu’il peut tout à fait y avoir urgence. L’insatisfaction liée aux coûts augmente naturellement lorsqu’on évoque la réduction des prestations. Il faut venir à bout de ces aspects.

Petra Goessi in an echo-interview

Faut-il impliquer les retraités dans l’assainissement du système de prévoyance ou considérer comme tabous les droits acquis une fois à une rente?

Politiquement, il ne peut y avoir de baisse des retraites. Les projets qui en prévoient échoueront faute de majorité. Il s’agit, sur cette question, de faire preuve de la sensibilité nécessaire. Le PLR dit nettement que l’assainissement de la prévoyance vieillesse doit se faire sans baisse des retraites; c’est pour nous un principe clair.

Quelles sont actuellement, de votre point de vue, les plus grands défis pour le 2e pilier?

À l’égard des assurés, j’entends toujours que «la sanction liée à l’âge» dans le 2e pilier est un gros problème: lorsque les salariés sont âgés, l’employeur doit verser à la fois un salaire plus élevé et des cotisations de prévoyance plus importantes. Il faut absolument aborder cette question en lien avec la problématique des salariés de plus de 50 ans. Le PS a rejeté nos propositions à cet égard. C’est là qu’il y a une différence entre la rhétorique de la gauche et son comportement effectif au Parlement. Le deuxième grand défi concerne les coûts et le thème connexe des structures organisationnelles des caisses de pension.

L’État ne devrait-il pas encourager un renforcement du 3e pilier pour soulager les deux premiers piliers?

Le 3e pilier permet à chacun de décider seul du montant qu’il souhaite épargner pour la troisième partie de sa vie. Les montants actuellement soumis à des déductions fiscales offrent en la matière des possibilités très restreintes. Si on pouvait à l’avenir verser sur le 3e pilier des montants fiscalement déductibles plus importants, ce serait certainement un outil de flexibilisation.

Si vous pouviez donner un conseil aux caisses de pension, quel serait-il?

Le plus important, c’est la confiance des gens. C’est, à long terme, lorsque les caisses de pension sont transparentes qu’elles fonctionnent le mieux, car elles gagnent alors la confiance de la population. En fin de compte, ce comportement bénéficie à tout le monde, c’est-à-dire l’ensemble de l’économie, et non pas uniquement à elles. Elles ne peuvent vraisemblablement pas se contenter pour cela d’un courrier de fin d’année. Les salariés doivent prendre davantage conscience du fait que le 2e pilier n’est pas pareil que l’AVS. Ceux qui connaissent les différences et comprennent les divers systèmes sont plus informés lorsqu’ils se rendent aux urnes.




NOTES SUR LA PERSONNE
Petra Gössi
conseillère nationale et présidente du PLR.Les Libéraux-Radicaux Suisse

Petra Gössi, née en 1976, est présidente du PLR.Les Libéraux-Radicaux Suisse. Elle a étudié le droit à l’Université de Berne et a suivi un cursus post-diplôme de Master of Economic Crime Investigation à la Haute école de Lucerne. Elle est conseillère juridique, fiscale et entrepreneuriale chez Baryon AG, à Zurich. Sa carrière politique a commencé dans le canton de Schwytz, ou elle a vécu entre 2004 et 2011 et ou elle a exercé dès 2008 la fonction de présidente du groupe PLR. Mme Gössi fait partie du Conseil national depuis les élections parlementaires de 2011. Lors de l’Assemblée des délégués du 16 avril 2016, elle a été élue à l’unanimité présidente du PLR.Les Libéraux-Radicaux Suisse.

echo-Interview avec Petra Gössi

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